Périphérie moldave

Périphérie moldave, la vie de Petru

 

Petru, 50 ans, vit à Chisinau, capitale de la Moldavie. Loin des artères commerciales du centre-ville. Depuis un an, il veille sur un lopin de terre appartenant à trois policiers qui le rémunèrent 3000 lei par mois (180 euros) pour s’occuper de leurs lapins, dindons, chèvres et poules.

Depuis sa cabane exiguë sans eau courante ni électricité, on distingue au loin les imposantes barres d’immeubles de la périphérie de Chisinau : « Ici je respire l’air frais, c’est bien mieux que de vivre dans un immeuble. Et puis je suis pas très loin de la ville. Parfois, je prends un bus pour acheter du pain et voir des copains ». A l’époque de l’Union Soviétique, Petru travaillait dans une usine de découpe de viande. Il a ensuite été ouvrier dans le bâtiment puis gardien d’un dépôt de bus. Il a aussi fait la guerre en Afghanistan (envahi par l’URSS en 1979 à 1989) pendant deux ans. Là-bas, il raconte avoir tué, par accident, une gamine de dix ans. Petru est hanté par ce souvenir. Il en pleure, des fois, la nuit.

Comme beaucoup de Moldaves (1), Petru regrette le temps où la Moldavie faisait partie de l’URSS : « On vivait mieux avant. On avait tous un travail, de quoi se loger et manger. Maintenant tout est devenu plus cher, c’est bien plus difficile de vivre. Aujourd’hui, quand tu as un problème, tu ne sais pas à qui t’adresser, à qui demander de l’aide. » La nuit tombe, les poules rentrent toutes seules dans leurs abris. Les chèvres déboulent des hauteurs du champ. Petru les hèle pour la forme et se ressert un verre de vin.

Février à juillet 2011.

Un an et demi plus tard, en décembre 2012, sa bicoque était toujours là mais lui avait disparu. Un vieux qui le côtoyait m’a confié : « Il buvait beaucoup, il est parti et s’est fait remplacer. Je ne sais pas ce qu’il est devenu, peut être qu’il est mort. »

1 – Selon un sondage réalisé en février 2011, 49% des sondés « regrettent la chute de l’Union Soviétique ».